CONGO-BRAZZAVILLE : Une initiative citoyenne confuse


Après l’appel des évêques du Congo, lesquels invitaient les acteurs politiques congolais au dialogue. Les initiatives se sont multipliées allant pour la plupart dans le sens de la concertation. Ces démarches, qui sont louables de prime à bord, n’échappent malheureusement pas à la critique. Cette critique viserait à améliorer les actions qui sous-entendent sortir le Congo de la crise politique qui l’étrangle chaque jour un peu plus. 

Notre analyse portera sur les actions de l’Initiative le Congo que vous voulons, la problématique qu’elle pose, la lecture que nous en donnons et dans une moindre mesure le message que l'initiative renvoie au peuple qui n’a plus foi en ses dirigeants par l'indélicatesse de son promoteur.  
Le contexte politique
Il est difficile d’évoquer le contexte politique actuel du Congo-Brazzaville sans aborder le changement de la Constitution du 20 janvier 2002. Est-ce qu'il faut rappeler que le changement de la constitution est la cause lointaine de la dernière crise du département pool, mieux il a suscité la désapprobation du chapelet des consultations qui ont suivi. Les institutions sont l’ombre de cette vague de contestations quand bien même les autorités politiques à leur corps défendant ferment les yeux devant les évidences. À la chambre basse du Parlement, le président, ne cesse de tirer la sonnette d’alarme, mais en vain... Les élus n’ont que faire, le peuple peut toujours attendre, attendre que les primes soient versées, attendent qu'ils consultent un peuple virtuel pour faire le lit de leur promoteur.
Les dialogues qui accouchent des souris.
Depuis son retour triomphal du pouvoir par un coup de force, le président de la République Denis Sassou tant a redoré le blason de son régime, mais ne parvient pas à faire peau neuve. Du dialogue sans exclusif en passant par les dialogues d’Ewo, de Dolisie, de Sibiti et de Ouesso , les autorités congolaises ont visé de tout temps la cohésion. Mais ses dialogues n’ont pas pu réconcilier les acteurs avec le peuple. Ces derniers retiennent les populations en otage, car l’ethnocentrisme est le seul gage de la mobilisation. Les acteurs politiques ont trouvé les compromis, d’aucuns sont intéressés par des nominations et d’autres sont contentés par des sommes faramineuses. Après ce chapelet de dialogue, le peuple désenchante, il va chercher les solutions ailleurs… Et pourtant, le dialogue n’a pas perdu ses vertus. Les acteurs politiques ne débattent pas sur l’avenir du Congo, ils se partagent le cadeau avec la menace que le Congo ne replonge dans le cycle des guerres. Comme si les Congolais ne savaient pas lesquels avaient fait la guerre et ce pourquoi ils l’auraient… Les simulacres de dialogues ou mieux les négociations entre les acteurs politiques présentées comme des dialogues civiles commencent à avoir raison du peuple. Frileux à l’idée de toute concertation, les Congolais ont de plus en plus le sentiment que la violence dans sa large gamme d’expressions est l’unique moyen de venir à bout d’un régime dont chaque jour qui passe, révèle sa part de vérité. Les dialogues ont donc creusé le fossé entre le peuple et les dirigeants. 


Mais à qui incombe la responsabilité ?

Naturellement aux initiateurs qui ne posent pas les bonnes questions. C’est d’autant plus facile pour nous d’accuser et de tourner la page. Le Congo est doté d’institutions quoique leur légitimité soit sujette à caution. Dans le précédent chapitre, nous avons évoqué le fait que les députés brillent avec un absentéisme notoire, ce qui ne garantit pas d’atteindre le quorum et donc de statuer sur quoique se soit… L’organisation administrative du pays accorde bien de possibilité au gouvernement congolais afin de recueillir l’avis du peuple. Nul n’est besoin de rappeler que dans chaque circonscription administrative l’Etat congolais dispose de référent plus ou moins proche des populations. Nous faisons allusion au chef de blocs, de quartiers et de villages. À divers niveaux, ces commis de l’Etat sont au parfum des préoccupations du peuple. 

L’action politique est avilie.
Les acteurs politiques et les représentants de l’Etat dans les quartiers, villages, arrondissements, et même dans les départements ne sont pas en odeur de sainteté avec les populations. Il faut dire qu’ils seraient pour la plupart à la manœuvre des basses besognes du pouvoir du genre tripatouillage du fichier électoral, organisation des fraudes pendant les scrutins... Bref, ils sont pris comme les représentants du pouvoir et non de l’Etat. Ces représentants n’inspirent pas confiance, non pas parce qu’ils seraient incompétents, bien au contraire parce qu’ils sont politiques, foncièrement politiques sans être des citoyens. Les organisations non-gouvernementales sont bien placées pour jouer ce rôle plutôt régalien. En effet, l’action politique du moins des représentants de l’Etat tels que les maires et les préfets devaient militer pour la construction de la nation et non au maintien d’un régime au pouvoir. Et donc, les organisations telles que les églises toutes engeances confondues jouissent d’une crédibilité qui donne force de loi à un dialogue.
Le dialogue civil
Nous pensons que si la conférence nationale de 1991 était présidée par un acteur politique, elle n’aurait pas apporté le regain d’espoir qui entretient la détermination du peuple congolais à aller vers la démocratie. Le terrorisme qui constitue d’effrayer et d’intimider aussi bien les activistes que le peuple, n’aura pas raison de notre quête de liberté.


Une anecdote « j’ai publié une réflexion sur Facebook qui allait dans le sens de la légitimité de l’organisation des consultations, je vous assure que les internautes qui m’ont fait l’honneur de réagir, ont plutôt abondé dans le sens de la récusation. Ainsi, ils pensent dans l’ensemble qu’il importait de poser des actes, mieux que la dénonciation n’avait plus sa place au Congo-Brazzaville. Non seulement que le pouvoir était dur d’oreille, mais pourrait pousser le bouchon plus loin avec des emprisonnements et pourquoi pas des assassinats. C’est dire que la violence sévit sous cette forme. »
Au-delà des statistiques qui placent l'Église catholique comme la principale organisation non-gouvernementale au Congo-Brazzaville, elle parvient en outre à faire l’unanimité dans son organisation sociale qui serait un modèle prisé par le peuple Congolais. Les détracteurs du dialogue sous toutes ses formes discréditent depuis un moment la conférence nationale qui a posé les bases de la démocratie au Congo, avec le multipartisme et la garantie des libertés fondamentales, disant tout le blabla qui donne de la consistance à la démocratie.Les hommes d’églises ont été au service de la nation en l’occurrence Monseigneur Nkombo. Ils continuent d’appeler au dialogue ses hommes d’église, mais les autorités congolaises se ferment dans leurs carapaces,  en feignant de ne pas écouter le peuple qui rumine et le clergé qui tire la sonnette d’alarme.
Et puis un jour le fils du président Denis Sassou Nguesso décide d’écouter le peuple…Nous autres partisans du dialogue devrons s’en réjouir, mais on n’est pas aussi dupe que ça pour donner, caution à une mascarade qui n’a aucun scrupule sur le sens des responsabilités du peuple Congolais. Après environ quarante (40) ans de règne que le président Denis Sassou Nguesso encourage des [jeunes] sous la houlette de son fils député fut-il de sillonner les départements pour recueillir l’avis du peuple. C’est moche, je pense à Soni Labou Tansi avec son roman l’Anté-Peuple, c’est vraiment moche qu’au soir de son règne que le président Denis Sassou Nguesso abrège aussi bien les institutions que l’administration par un groupe de jeunes furent-ils élu pour consulter le peuple sur le Congo qu’ils veulent… Il faut d’abord savoir de qui émane la formulation ? Serait-elle le reflet des aspirations du peuple que cette initiative entend défendre ? Certainement le statut des initiateurs à avoir avec la légitimité du rapport que produirait cette initiative.
Les députés hors-jeu
Si le statut des animateurs de l’initiative leur aurait ouvert les portes de la présidence de la République. Nous craignons que ses élus du peuple sortent de leur champ d’action. La première idée qui nous vient à l’esprit est que les élus qui se réunissent de façon toute à fait officieuse, devaient au mieux proposer la loi, si non de faire parvenir un rapport au président de leur chambre. Il faut dire que le malaise est ressenti d’entrée de jeu. Les députés, seraient-ils sortis de leur carré avec la bénédiction du président de la République, non pas exactement, mais plutôt avec son fils qui est l’unique instigateur de cette campagne qui empeste du favoritisme et le népotisme. Mais qu’en est-il des députés qui ne sont pas de l’initiative qui voient leurs collègues harangués des populations dans leur discours ? Les autorités administratives ne sont pas inquiétées, mieux rempilent… Les députés que nous pouvons d’ailleurs citer à savoir Exaucé Bersol Ngambili-Ibam (député de la deuxième circonscription de Djiri)Galibali Ghyslain Millet (député de la circonscription de Lekana) et Placide Elbe Bidié (député de la circonscription de Mfilou). 
Avec qui échanger
L'exclusivité, ne revient-elle pas aux institutions pour consulter le peuple ? Aussi, les proches du président de la République accompagneraient mieux le président de la République en se mettant en retrait s’ils ne visent que le soutenir. Si par malheur, il est admis que le président de la République pouvait recevoir des individualités et leur confier des missions qui révéleraient du pouvoir législatif. La République pourrait imploser…
La voie du dialogue est une voie royale pour sortir des crises. Toutefois, plusieurs acteurs concourent aux succès du dialogue. C’est autant dire qu’il n’y a pas de profil pour initier le dialogue. Cependant, il importe de faire recours aux voies officieuses quand les voies officielles ont été épuisées. Au Congo, Denis Christel Sassou Nguesso n’est pas le facilitateur idéal dans le cadre de la réconciliation entre le peuple congolais et sa classe politique. Les ambitions du fils cadet du président de la République de succéder à son père ne sont qu’un secret de polichinelle et donc toute action qu’il entreprend, viserait uniquement à renforcer ses positions.

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